Religion ou Hérésie...
Le paganisme désigne l'ensemble des religions des païens
Les chrétiens de la partie occidentale de l'Empire romain ont appelé « païens », en latin pagani tous ceux qui, en dehors des juifs, pratiquaient un autre culte que le leur. Paganus signifie « qui est du pagus », c'est-à-dire du canton, du « pays » (ce dernier mot vient de pagus). Comme paganus peut signifier plus particulièrement, par synecdoque, « paysan », on a longtemps cru que « païen » voulait dire « paysan », « campagnard » et que son emploi se référait au fait que les gens des campagnes, à cause de leur isolement et de leur rusticité, étaient restés tardivement attachés aux anciens cultes.
En réalité, le mot « païen » est employé assez tôt en ce sens (dès Tertullien, au II e siècle), alors que la majorité des citadins avaient encore des cultes païens, eux aussi. D'ailleurs, le paganisme est resté longtemps encore bien ancré dans les villes et répandu dans les élites intellectuelles, c'est le cas en particulier de Rome, dont le Sénat était encore à majorité païenne sous Théodose Ier. Ce n'est donc pas au sens de « paysan » que paganus a été utilisé dans le domaine religieux.
Aujourd'hui, on considère plutôt que le « païen » était « l'homme du pays », l'indigène, qui conservait les usages locaux, par contraste avec les habitants venus d'autres parties de l'empire. D'ailleurs, jusqu'à une époque assez tardive, une bonne partie du clergé dans les régions occidentales est d'origine orientale, Grecs, Syriens, Égyptiens, etc...
Dans les limites géographiques du monde antique, centré sur la Méditerranée, de nombreuses religions ont existé. En Mésopotamie, en Egypte, en Grèce puis à Rome, les divinités étaient multiples, locales ou importées. Les divinités archaïques, souvent agrestes ou chtoniennes, ont évolué vers des divinités plus humaines, policées, dont les Olympiens sont le meilleur exemple.
Cependant, il n'existait pas de mot pour désigner l'ensemble des religions, bien que l'empire romain eut consolidé les échanges de toutes nature entre ces peuples.
D'autres religions encore existaient, au nord de l'Europe, en Orient ou Extrême-Orient, en Afrique, etc.
c'est à dire la croyance en plusieurs dieux, et la tolérance pour les dieux des autres, assortie d'emprunts fréquents : Isis avait son temple à Rome, et les Césars les leurs à Alexandrie.
Dans le monde méditerranéen, la première dissonance devait venir des Hébreux : monothéistes et peuple élu, la Judée était une province romaine bien particulière, avec son pouvoir religieux articulé au pouvoir politique de Rome, dont la Bible raconte les démêlés. Les juifs ne reconnaissaient pas les autres dieux, ni la divinité de César. César s'en accommodait, le peuple élu étant forcément limité.
Puis vint le christianisme. Articulée sur le monothéisme hébreux, cette religion excluait aussi la reconnaissance de tout autre dieu. Le Mithraisme récent, monothéiste aussi, n'avait pas cette exclusive. Mais ouvert à tous, le christianisme ne tardait pas à devenir majeur et à se doter d'une église, puis à compter des empereurs dans ses rangs. De son émergence à la conquête du pouvoir suprême, l'affaire avait pris à peine trois siècles.
Ces chrétiens désignèrent alors comme "paganisme" toutes les religions connues autres que la leur, que pratiquaient les "païens". L'étymologie du mot montre l'intention péjorative. Seuls les juifs hébraïques, qui partageaient le même Dieu, gardaient une identité distincte.
En 391 et 392, le mot est utilisé officiellement dans la législation par Théodose Ier, empereur romain catholique, pour interdire ces religions dans tout l'empire, déjà chrétien depuis 380. Puis viendront, au début du Vème Siècle, les destructions massives et les pillages, quelques massacres, auxquels ces religions éparpillées, sans clergé et sans dogme, ne survivront guère.
Bien que le christianisme, religion officielle et unique de l'empire romain depuis 380, s'étende ensuite largement en Europe (Charlemagne, Saint Empire Romain Germanique), des cultes et pratiques paiennes ont encore lieu les siècles suivants, mais la clandestinité devient une question de survie. Dans ces conditions, l'absence de textes sacrés, la tradition orale, le secret des cultes, contribueront à faire disparaitre ces religions anciennes. Quelques "fêtes traditionnelles" de nos campagnes existent encore de nos jours, mais n'ont plus de signification religieuse. Notre bûche de Noël est une survivance païenne, comme le Carnaval, etc.
Des résurgences religieuses auront lieu en Europe, des "néo-paganismes", notamment à la Renaissance, mais aussi au XIXème siècle (Germanisme, celtisme), et encore de nos jours (Wicca, YSEE).
De nos jours, on qualifie aussi de paganisme, du moins avec le regard de la culture chrétienne d'Europe, des religions lointaines qui n'ont jamais participé à la fondation du mot, comme l'hindouisme.
Mises en gardes ...
Il ne faut pas confondre le paganisme avec l'athéisme. Les païens ont un sens mystique et du sacré, étranger aux athées.
Le satanisme est-il un paganisme? Bien qu'il entre parfaitement dans la définition initiale du mot, on peut difficilement dénier qu'il est un avatar du christianisme, et n'existerait pas sans lui. Le fait que le Diable soit un avatar chrétien de Dionysos ne simplifie pas la question.